Heinlein, Histoire du futur tome I

Publié le par Lael

"l'histoire du futur" est un regroupement de nouvelles écrites par Heinlein dans les années 50, en pleine période de l'Age d'Or de la SF américaine. Il nous raconte comment l'homme va parvenir, notamment par le biais d'innovations technologiques, à conquérir les étoiles. Ce premier tome se concentre sur la Terre du 20ème sciècle, le besoin de nouvelles énergies, et la conquête de la Lune (d'une manière fort peu orthodoxe !).

 

Cette édition de Folio SF ouvre sur une préface de Damon Knight assez intéressante. J'ai lu ce livre dans le cadre du Défi Heinlein lancé par Traqueur Stellaire (merci à lui  ) et je réagis ici en partis à son avis sur ce livre.

 

9782070317523.jpg"Ligne de vie"


Un scientifique présente à ses confrères incrédules une machine permettant de prévoir avec exactitude la date du décès de quelqu'un !

 

Il est plaisant de retrouver l'écriture d'Heinlein, une écriture classique, un peu "épaisse" parfois dans le vocabulaire usité, mais qui coule bien paradoxalement. Intéressant son découpage de quelques scènes-clés dans une histoire se passant sur plusieurs années.

Par contre je reste un peu perplexe. Qu'à t'il voulu montrer ? Le fait que la science est trop centrée sur son nombril pour accepter d'évoluer ? Que c'est l'économie qui dirige et qui décide du sort de grandes inventions, pour protéger l'intérêt des lobbyings ? Peut être était ce révolutionnaire à l'époque, aujourd'hui cela me paraît éventé, rabâché trop souvent.

 

Je ne suis pas rentrée dans le trip. 1/5


 

"Les routes doivent rouler"


Des tapis roulant titanesques ont remplacés l'automobile. Tout roule... mais la révolte des ouvriers du tapis gronde !

 

Là c'est bien du Heinlein, on est en plein dans l'âge d'Or. Une idée franchement délirante, assez sympa et relativement bien décrite, même si certains "détails" me laissent très perplexe : comment passer d'un tapis à l'autre sans se casser la figure ?! Sachant qu'un essai de tapis roulant rapide à Montparnasse a été un échec, et que la moyenne actuelle est de 4km/h (dans le récit, la première bande fait du 8km/h). A part ça l'idée d'utiliser la vitesse relative est bonne, même si elle n'est pas explicité (ce que j'entends par là : impossible de monter directement sur un tapis qui fait du 150km heure ! Il faut donc passer d'un tapis à un autre, à chaque fois un peu plus rapide. Vu que le passager est lui même en mouvement, il ne perçoit que la légère différence, et non la vitesse globale).

 

On retrouve aussi bien Heinlein dans la construction du récit et sa patte à l'écriture :

-Un rendez vous avec un homme d'affaire à qui on doit présenter les tapis, l'occasion idéale d'expliquer l'idée dans le détail pour le lecteur.

-Des scènes découpés, on passe d'un endroit à un autre sans prévenir.

-Une intro  in medias res, souvent un dialogue comme ici.

-Après une fort longue introduction pour mettre en place, expliquer le contexte... bam on rentre dans l'action de plein fouet, et on en sort plus.

-Des personnages pas toujours bien fins et d'autres bien esquissés. Le personnage principal rappelle le héros de "la route pour la gloire" : un mélange d'intelligence intérieure et de soldat efficace.

 

Évidement ce n'est pas toujours comme ça, mais j'ai remarqué que ce genre d'éléments est souvent utilisés par Heinlein. Bref je sais pas si j'arrive à bien vous décrire ce que je ressens, mais souvent j'ai la sensation de retrouver les mêmes habitudes d'écriture.

Pour revenir au texte, malheureusement ça part en récit d'aventure et d'action pas forcément très fut-fut, assez classique de l'âge d'or, mais pas de très bonne qualité à mon goût. On est presque dans une sorte de Bob Morane (ce n'est pas forcément en la défaveur de Bob soit dit en passant, suivant ses aventures le niveau n'est pas le même).

 

L'ensemble reste malgré tout fort plaisant et distrayant. J'ai notamment aimé la reflexion sur l'importance des moyens de communications, et de la technologie de manière globale, pour une société. 3/5

 

"Il arrive que ça saute"


Ou comment gérer l'ingérable : une bombe atomique utile pour produire de l'énergie, mais pouvant faire exploser la planète !

 

Déjà il y a un flou sur la publication de cette nouvelle : Traqueur Stellaire parle de 1940, mais Heinlein cite Hiroshima, donc 1945 ! A moins qu'elle n'ai été réécrite, qu'il y ai deux versions ? Bref. Cette nouvelle pose le problème du nucléaire civile, utile mais si dangeureux. Dois t'on prendre un tel risque ? Est il possible pour les ingénieurs s'occupant de la centrale de ne pas devenir fou avec une telle responsabilité entre les mains ?

 

Ce que je n'ai pas aimé, c'est les élucubrations scientifiques sur la bombe atomique. Je ne m'y connais pas, je ne suis pas une scientifique, et j'ai detesté passer mon temps à me demander "il invente ou c'est vrai ce qu'il raconte ?".

Je n'ai pas aimé non plus la vision finalement "gentillette" du nucléaire : oui ça peut péter à tout moment et exploser la planète, mais quid des déchets nucléaires, et envoyer la bombe dans l'espace, prendre ce risque de fou... nan, pas de problème pour Heinlein "-_- Certes il n'y avait pas la connaissance que l'on a acquise par expérience depuis Hiroshima, mais ça m'a quelque peu gêné. A part la menace d'explosion, le nucléaire est vu comme un progrès visionnaire et entouré du même aura que l'exploration dans l'espace (peut être l'optimisme de l'âge d'or ?).

J'ai trouvé aussi assez olé-olé la théorie sur la lune (je doute que même avec une atmosphère elle soit viable, après certes, pas à notre forme de vie mais bon).

 

Mais j'ai apprécié la vision psychologique de la chose. La tension insoutenable sur les épaules des techniciens est parfaitement rendue. Le problème du contrôle necessaire, mais qui engendre lui même du stress, un vrai cercle vicieux... mais comment arriver à cette perfection hypothétique d'aucune erreur possible ? Sinon 'boum'... Un psy vient donner son grain de sel et effectue pas mal de remarques très pertinentes.

Enfin j'ai aimé la réflexion sur le fait que le problème du nucléaire n'est pas technique avant tout. Je cite Heinlein, à propos du fait d'arrêter la centrale : "nous ne sommes pas confrontés au problème physique mais à une situation politique et économique."

 

Bref, le traitement psychologique m'a plû tandis que le côté scientifique m'a gêné. Une plutôt bonne nouvelle. 3/5

 

"L'homme qui vendit la lune"


Un homme espère avoir assez d'argent pour réaliser son rêve : aller sur la Lune. Quitte à devoir magouiller au maximum... même à la vendre !

 

Cette nouvelle m'a amusée par le côté esprit retors qui invente combine sur combine pour retirer un max d'argent. Parce que forcément, aller sur la Lune, ça coûte beaucoup d'argent. Et Harriman ne souhaite surtout pas que l'état se mêle de son affaire... Non seulement il ira sur la Lune, mais cela sonnera le début d'une nouvelle ère de conquète spatiale. Et tant qu'à faire, ça rapportera aussi beaucoup d'argent... Mais je ne l'ai pas trouvé sans foi ni loi, je veux dire, il n'a pas recours au meurtre non plus, c'est simplement un homme d'affaire qui cherche à réaliser son rêve et qui s'y donne à fond. Et c'est son côté idéaliste qui ressort avant tout du personnage. Ainsi il a réfléchit pour que la conquète de la Lune ne crée pas une nouvelle guerre mondiale (même si bien sûr ce n'est pas son seul objectif). Alors oui peut être que les hommes d'affaires qui le finance, à jouer les requins autour de lui, ne sont pas vraiment de bonne compagnie, mais je trouve qu'au final c'est une nouvelle très honnête et qui garde ce côté fondamentalement optimiste de l'âge d'or.

 

Un peu trop de blabla économiste pour moi mais, une bonne nouvelle, divertissante. Et vers la fin un bon trip de savoir si oui ou non ils vont y arriver. 3/5

 

"Dalila et l'homme de l'espace"


  A la première station spatiale, un nouvel ingénieur débarque... une femme ! Le gérant de la station craint le pire...

 

C'est une nouvelle assez courte et pas très passionnante. Oui, voilà soudain une femme qui débarque dans un contexte d'hommes et on peut y voir une revendication pour le droit des femmes à être considérés comme l'égal de l'homme. Elle est émancipée et audacieuse, et il est démontré que ses collègues macho ont mauvais prétexte à penser qu'elle va mettre la pagaille. Mais je n'ai pas trouvé ça très convaincant ni mordant. Seul intérêt que j'y vois, le principe que la présence des deux sexes dans l'espace est inévitable, c'est la vie et y'a pas de raison que cela se passe mal (en tout cas moins bien qu'en bas sur Terre).

 

Je n'y voit pas un "vibrant plaidoyer" comme Traqueur Stellaire, juste une nouvelle au thème osé pour l'époque mais au traitement faiblard. 2/5

 

Conclusion ?

 

defi robert heinlein smallJe retrouve bien là Heinlein, distrayant et intéressant par moment même si l'ensemble reste un peu fade. Je lui ai préféré Double Etoile qui brillait par son originalité. Reste qu'il est sympa d'imaginer ce futur proche et comment cela aurait pu évoluer. On suit Heinlein dans son raisonnement pour nous envoler dans l'espace et j'aime ça. Cela rapproche notre présent du futur en quelque sorte...

 

3/5 Pas indispensable mais divertissant.

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G
<br /> Oui "Blowups Happen" a été retouchée en 1946 pour prendre en compte les dernières connaissances en nucléaire, mais pas sur le fond de la nouvelle en elle-même. Il ne faut pas oublier que Heinlein<br /> avait une formation scientifique, ce qui lui a permis de suggérer un prototype fictif de centrale atomique dès 1940 !<br /> <br /> <br />
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