Les Temps parallèles, de Silverberg [critique éclair]
SF, new wave, "time opera"
La dernière mode, c'est le tourisme temporel. Visitez la Constantinople mise à sac par les croisées, allez assister la crucifixion du Christ... C'est comme ça que Jud, en manque de sensation forte, s'engage comme Guide. Sauf que les paradoxes temporels ne sont jamais bien loin pour mettre la pagaille !
"Jouissif", voilà qui décrit on ne peut mieux ce court roman. Silverberg est au sommet de son art, aussi bien dans l'écriture que l'histoire. Il m'a surpris avec l'avalanche de détails historiques sur la Constantinople antique, au point que j'ai vraiment eu l'impression de faire la "visite" du passé. De plus j'adore les intrigues de voyages dans le temps et j'ai été servie ! Silverberg use des grands classiques (et si on tuait son grand père que se passerait il ?) mais en les reprennant à sa sauce à lui : news wave axé sexe, recherche identitaire, drogue et fantasmes, ou le paradoxe du grand-père devient celle de la grand-mère ! La question étant qu'adviendrait-il si on couchait avec son ancêtre ? lol quoi c'est juste tordant ! La sexualité est d'ailleurs très bien intégrée au récit sans être très vulgaire (bon c'est pas soft pour autant entendons nous, mais disons qu'il sait y faire, alternant description crue et poétique). Mention spéciale pour la scène d'amour avec Pulchérie (au nom affreux soit dit en passant) où l'on passe d'une description émoustillante à une explication qui n'a rien de romantique, avant d'ergoter sur "qu'est ce que l'amour" vu par les mecs, c'est juste excellent (où comment Silverberg casse le côté macho de son perso).
Malgré le côté "fun" affiché du livre, celui-ci possède aussi un côté assez sérieux. L'ambiance est mélo / triste avec le personnage principal qui est plus ou moins dépressif et ne sait pas quoi faire de sa vie. Quant à la société future décrite, même si elle se résume à beaucoup de débauche, elle n'en reste pas moins assez sombre : la vie privée est pour ainsi dire inexistante, les gens vivent avant tout sous-terre (même si l'avantage est visiblement des tenues très légères)... et la norme de la beauté a pris le dessus au point que chacun peut demander à une sorte de généticien de trifouiller dans les gènes pour privilégier tel ou tel caractère ! La Patrouille du Temps guette, et son intransigeance surtout montre la dureté de cette société.
Enfin j'oubliais de dire que j'ai beaucoup aimé le regard de ce visiteur du futur sur notre monde moderne : pour lui nous sommes terriblement malheureux, moches et coincés ! lol
Mais, parce qu'il y a toujours un mais... ce livre a beau être un coup de coeur, je vais lui mettre 4/5 seulement. Tout simplement parce que le point de vue masculin sur la situation, si c'était très intéressant souvent, et bien c'était aussi déstabilisant parfois. Notamment c'est vrai le côté femme-objet. Dans tout les livres que j'ai pu lire de Silverberg (c'est le troisième), la sexualité est fort présente et la femme réduite au désir physique, mais je mettrais une nuance. Je ne sais pas trop pourquoi mais globalement je sens du respect pour la femme, elle est plutot montée sur un pied d'estal, vue comme une icône, que l'inverse. Même si on trouve aussi des personnages féminins réduits à, comment dire sans être vulgaire... zut "-_- elles sont "chaudes" quoi. C'est le désir sous toutes ses formes en fait, masculin comme féminin. Et puis, les hommes en prennent aussi bien pour leur grade XD Tout ça pour dire que c'est un peu perturbant parfois, on ne sait pas trop sur quel pied danser avec Silverberg.
Je signale aussi que j'ai sauté le chapitre sur la peste noire parce que je sens que ça m'aurais donné des cauchemars.
Bref ne vous attendez surtout pas à une explication scientifique des voyages temporels -Silverberg ne dit rien sur la technique utilisée pour sauter- mais préparez vous pour un divertissement fun avec un vrai délire sur les paradoxes, mis en pratique, et une sexualité débridée ! Une lecture-plaisir dans un style très fluide 4/5
ps : je meurt d'envie de vous mettre pleins de citations, mais après y'a plus la surprise ! Et puis je ne suis pas sûre d'avoir le droit de mettre des citations porno/erotique
Autres critiques : Eumène, Pitivier, Julien le Naufragé Volontaire, Traqueur stellaire