Star Trek selon JJ Abrams - ST 11 (deuxième partie)
Star Trek 2009 c'est donc un blockbuster à grands effets qui aurait (presque) pu s'appeler tout pareil Transformers et autre super héros (je me moque à peine). Même façon de raconter l'histoire, de filmer au plus près (trop près), de miser tout sur l'action hyper rapide, sur les piques d'humour et sur une psychologie de base où n'importe quel spectateur lambda est censé se reconnaître (mais qui fait des personnages des stéréotypes sur pattes clonés)... sur l'émotion vive (où finalement on a pas le temps de se laisser imprégner du truc et on peut passer à côté... d'ailleurs il est vraiment dommage que le thème fort de 'laisser aller ses émotions' soit ici aussi mal utilisé).
Une histoire qui se résume par un méchant à trucider avant qu'il ne trucide la Terre. Et le visuel bien sûr. Les effets spéciaux, les explosions, il faut que ça déménage ! D'ailleurs même si j'ai aimé le soin apporté à l'image, j'ai trouvé qu'il y avait trop d'effets ("halos", mouvements de caméra...) qui n'apportaient pas de sens, qui étaient là... juste pour faire "fun". Mais la volonté est ici de faire de l'esbroufe, alors qui s'étonne de voir le prestidigitateur s'agiter en tout sens ?
Bref, tout pour que le spectateur ne réfléchisse pas et boive tout ça d'un trait. Et si la mixture est réussie, l'arrière goût sent trop le commercial standardisé à mes yeux (et perso ça me gave de bouffer les mêmes films "clones") (surtout qu'il suffit de mettre pause et réfléchir une minute pour voir un amoncellement d'incohérences, la plus belle étant le "vieux" Spock qui attendait, impuissant et seul, sur la planète de glace... puis explique deux minutes plus tard qu'il y a une base de la Fédération juste à côté, et si on y allait ?!!)
A revoir ce film, j'ai pu apprécier la nuance des personnages par rapport à la série originale, en y voyant vraiment une nouvelle recette basée sur l'ancienne, même si elle a trop tendance à prendre que le superflu et à l'exagérer. J'ai noté qu'il y avait finalement pas mal d'humour, et que rendre les personnages plus électriques, ça les rendaient aussi plus vivants (parce qu'il faut avouer que Star Trek version année 60 ce sont des personnages neurasthéniques -mais ça c'est l'époque). C'était plutot agréable de voir les membres d'équipages surdoués, et donc développer tout un panel de compétences parfois surprenantes, ce qui met là aussi une bonne dose de peps. Le tout en conservant très honorablement les caractères d'origine. Au passage le film se permet de donner une explication, bien qu'un peu bancale, du surnom du docteur McCoy, 'bones' (pour voir l'explication originale c'est ici). A noter qu'en VO Pavel à un accent russe à mourir de rire.
Mais. Mais l'histoire est faite pour réunir de manière artificielle les personnages, de créer en un film ce qui a mis des années à se construire : amitié et solidarité (enfin solidarité mitigé puisque personne n'est choqué que Spock abandonne Kirk sur une planète gelée hum). De là par exemple à créer un peu trop de hasard pas du tout hasardeux. Tout tourne de manière artificielle pour les personnages, plutôt que ce soit ceux ci qui servent l'histoire et qui murissent avec elle. Ici c'est l'équipe de supers-héros version mauvais comics...
La revisitation 2.0 du design global m'avait fait un certain choc la première fois : trop près, sans doute, de notre modernité. Cela se voit notamment avec les nouveaux uniformes qui dans leurs matière "plastique" évitent c'est sûr l'aspect "pyjama" du velours d'origine ; de même les insignes et les couleurs se font plus discrets ; mais je n'arrive pas à me faire à cette texture "à pois" (ça fait sportif ?!!). Les écrans à pianoter sont plus modernes (avec le fantasme holographique du moment), les commandes nous parraissent aussi plus naturelles (abaisser une manette plutot que d'appuyer sur un bouton), les phaser ont désormais des 'munitions'. Bref, on se retrouve ici dans un futur plus proche de nous. Impossible de ne pas citer la téléportation, complètement revisité : elle se dote d'un système de verrouillage qui n'est pas sans rappeller Galaxy Quest (dire que je l'ai revu une semaine avant) et parait bien moins efficace que ce à quoi Star Trek nous avait habitué. Bien plus longue, la contrainte de ne pas bouger, et un nouveau design. Plus réaliste en somme. Plus actif aussi, voir l'effet de warp.
Tout ça pour dire que comme tout on s'y fait, et la deuxième fois j'ai plutot aimé toutes ces revisitations qui restent malgré tout fidèle (d'autant que j'ai pu m'amuser des comparaisons car je revoyais la série originale au même moment). Mais ce que j'ai préféré avant tout, c'est la qualité des effets sur les vaisseaux, surtout celui de Nero (arf je me repète XD Mais imaginez ce genre là pour les Borgs, la claque !!!), et des effets sur les extraterrestres (enfin on oublie les romuliens) : juste des petits détails, comme des yeux immenses, ou des aliens pas forcément sur le devant mais là pour donner un background "c'est la Fédération, y'a pas que des humains". Et puis on sort enfin de la spirale "bon celui là on lui fait une crète frontale / nasale comment ?", parce qu'il faut bien dire qu'à ce niveau les ET de Star Trek n'ont jamais été très originaux graphiquement (enfin pour la plupart, évidement y'a toujours des exceptions). Là on a le droit à tout, même si cela "starwarise" le film : JJ Abrams a voulu faire son Star Wars avant l'heure. Ce n'est pas une surprise, et cela se voit aussi sur d'autres points, notamment la fine passerelle au dessus du vide avec un combat avec un méchant... je me suis presque attendu au "je suis ton père" !
Revenons à la vision de la Fédération façon JJ Abrams. Il y a certes des ET mais les humains sont au centre de tout, *SPOIL* la destruction d'une planète-mère de la fédération et le génocide *SPOIL*n'aura ébranlé personne pour que, dix minutes plus tard, tout continue comme si de rien n'était avec kirk (le culte du héros qui en plus n'a rien fait) en égérie... On revient ici à un ethnocentrisme primaire, d'autant que Spock, le seul extraterrestre mis en avant, est en fait un demi-humain principalement réduit à... son côté humain. Enfin la Terre apparait comme un mélange indigeste de tout et n'importe quoi, et surtout pas de Star Trek : argent et publicité à la pelle, alors que la fédération est une société où l'argent n'a plus court, où le mercantilisme n'existe plus... Encore une fois ce n'est plus s'écarter un peu de ce qui a été fait, c'est carrément inverser les fondements de la saga.
Conclusion :
Bref, Star Trek XI est le moins Star Trek de tout les Star Trek (et toc).
Il présente un futur plus réaliste, moins enthousiasmant dans la technologie et dans la psychologie d'attardés des personnages, mais reste quand même plaisant pour l'oeil. Il faut le voir pour le divertissement, comme un blockbuster commercial moderne, et il ne s'en sort pas si mal dans cette catégorie. C'est un film dynamique, explosif visuellement (un peu trop), un "bon" space opéra parce qu'on voyage et qu'on ne voit pas le temps passer, mais qui se résume beaucoup trop à "je vais tuer le méchant".
En choisissant l'action au détriment de la réflexion ce reboot ne respecte pas la saga d'origine, et il rate là la possibilité de passer de la casse "bon blockbuster" à "film culte". Il n'aurait pas fallut beaucoup : de la nuance dans le propos, un soupçon d'humanisme et de tolérance, une volonté d'aller plus loin que les schémas classiques...
Le reboot d'Abrams, par le rôle de Kirk notamment, fait le choix très contestable de l'apologie de cette génération "tête brûlé" qui s'estime tout dû, de cette génération qui consomme et brûle tout trop vite. Qui n'a plus peur de la mort, qui n'a plus notion de ce qu'est la vie. A vouloir faire quelque chose de "jeune" et de "dépoussiéré", Abrams va donc jusqu'à l'opposé de l'esprit de Roodenberry, de ce qui fait que des millions des fans adulent Star Trek. Il va certes récupérer d'autres types de fans. Mais n'y a t-il plus que le commerce et "être dans le vent" qui compte ?
Bien évidemment si vous n'avez jamais vu le moindre Star Trek, vous n'y verrez que du feu. En soit, tant mieux ! Mais sachez juste pourquoi certains fans sont "réac", sachez juste que ce Star Trek là, ce n'est plus le même que celui qui a une (très) longue saga à son actif. Une continuité qui a été gardé de manière exceptionnelle, sur quarante ans -même la dernière série en date qui s'essayait au préquel, fortement décriée, à sû faire là où JJ Abrams a échoué, c'est à dire à redonner une autre portée à la saga sans jamais trahir le reste.
Star Trek selon son créateur est mort, au moins à demi. La nouvelle vision d'Abrams reste porteuse d'un espoir, celui que ses héros mûrissent, celui que le présent hyperactif puisse rejoindre le passé réfléchit dans un même futur (si si relisez, c'est logique ^^). Mais l'espoir reste petit. Pour l'instant, j'ai juste l'impression qu'il a sorti Star Trek de sa cave pour réutiliser son nom, son succès, sur un blockbuster "classique". Un blockbuster pas mal dans son genre, et sur lequel il y a eut un travail visuel remarquable - mais un blockbuster qui reste "alimentaire" et passe à côté de la richesse du titre qu'il arbore avec fierté.
Affaire à suivre avec Star Trek Into Darkness !
3/5 (parce qu'il faut bien donner une note, mais comme le gars d'Unif -cf après- il y a une grande différence entre le noter pour la technique, pour le divertissement SF, et pour le côté Star Trek).
Autres critiques : cachou, Lorkhan, Guillaume, Vert
Et sur Unification-france une critique-discussion sympa, et un (très) long résumé/analyse commenté du film (qui vous pointera du doigts tout les détails incohérents et autres 'mesquineries commerciales'... à lire après avoir vu le film, encore plus si vous êtes un peu trekkie... je ne suis pas d'accord avec tout tout tout mais ça mériterait une selection choisie)
Note à propos du son : si la bande-son contient une rengaine pénible encore archi-prémachée, j'ai aimé que soit gardé les sons originaux à bord, ainsi que le passage de tir dans le vaisseau de Nero où l'on entend les ricochets contre l'acier.
edit : j'ai oublié de dire que là aussi où ce film est un gros "WTF" c'est sur son abbération scientifique avec les trous noirs qui servent les scenaristes comme ils le veulent, suivant chaque cas (et ne parlons pas de la "matière rouge". Genre même pas fichu de trouver un nom lol). Bref je ne m'étendrais pas là dessus, mais je signale juste qu'une autre particularité très forte de la saga originelle c'est sa rigueur scientifique et sa cohérence technologique (elle a d'ailleurs inspiré bien des innovations dans la vrai vie !).